jeudi 30 juin 2011

253



« Provisoirement figés : bientôt en mouvement, composant des tableaux gymnastiques, improvisant des ballets en perruques blondes, agrémentant de fééries liquides leurs tenues changeantes. »

mercredi 29 juin 2011

252




« Je chante les héros dont Ésope est le père,
Troupe de qui l'histoire, encor que mensongère,
Contient des vérités qui servent de leçons.
Tout parle en mon ouvrage, et même les poissons :
Ce qu'ils disent s'adresse à tous tant que nous sommes ;
Je me sers d'animaux pour instruire les hommes.
ILLUSTRE REJETON D'UN PRINCE aimé des cieux,
Sur qui le monde entier a maintenant les yeux,
Et qui, faisant fléchir les plus superbes têtes,
Comptera désormais ses jours par ses conquêtes,
Quelque autre te dira d'une plus forte voix
Les faits de tes aïeux et les vertus des rois.
Je vais t'entretenir de moindres aventures,
Te tracer en ces vers de légères peintures ;
Et si de t'agréer je n'emporte le prix,
J'aurai du moins l'honneur de l'avoir entrepris. »

mardi 28 juin 2011

251



« Finalement elle s'était habituée à tout cela - cette tranquille et nécessaire monotonie, la prudence, l'espionnage incessant. »

lundi 27 juin 2011

250



« Avant tout, préoccupe-toi de trouver l'objet de ton amour, soldat qui, pour la première fois, affrontes des combats où tu es neuf. Consacre tes efforts ensuite à toucher la jeune fille qui t'a plu, et, en troisième lieu, à faire durer ton amour. Voilà nos limites; voilà la carrière où notre char laissera sa trace; voilà la borne que devra serrer la roue lancée à toute vitesse. »

dimanche 26 juin 2011

249



« κτείνῃς ἠὲ δόλῳ ἢ ἀμφαδὸν ὀξέι χαλκῷ,
ἔρχεσθαι δὴ ἔπειτα λαβὼν ἐυῆρες ἐρετμόν,
εἰς ὅ κε τοὺς ἀφίκηαι οἳ οὐκ ἴσασι θάλασσαν
ἀνέρες, οὐδέ θ᾽ ἅλεσσι μεμιγμένον εἶδαρ ἔδουσιν·
οὐδ᾽ ἄρα τοί γ᾽ ἴσασι νέας φοινικοπαρῄους
oὐδ᾽ ἐυήρε᾽ ἐρετμά, τά τε πτερὰ νηυσὶ πέλονται.
σῆμα δέ τοι ἐρέω μάλ᾽ ἀριφραδές, οὐδέ σε λήσει·
ὁππότε κεν δή τοι συμβλήμενος ἄλλος ὁδίτης
φήῃ ἀθηρηλοιγὸν ἔχειν ἀνὰ φαιδίμῳ ὤμῳ,
καὶ τότε δὴ γαίῃ πήξας ἐυῆρες ἐρετμόν,
ῥέξας ἱερὰ καλὰ Ποσειδάωνι ἄνακτι,
ἀρνειὸν ταῦρόν τε συῶν τ᾽ ἐπιβήτορα κάπρον,
οἴκαδ᾽ ἀποστείχειν ἔρδειν θ᾽ ἱερᾶς ἑκατόμβας
ἀθανάτοισι θεοῖσι, τοὶ οὐρανὸν εὐρὺν ἔχουσι,
πᾶσι μάλ᾽ ἑξείης. θάνατος δέ τοι ἐξ ἁλὸς αὐτῷ
ἀβληχρὸς μάλα τοῖος ἐλεύσεται, ὅς κέ σε πέφνῃ
γήραι ὕπο λιπαρῷ ἀρημένον· ἀμφὶ δὲ λαοὶ
ὄλβιοι ἔσσονται. τὰ δέ τοι νημερτέα εἴρω.

alors prends une rame bien faite et va,
jusqu'à ce que tu arrives chez des hommes
qui ignorent la mer et mangent leur pitance sans sel;
ils ne connaissent donc point les vaisseaux aux flancs rouges,
ni les rames bien faites, qui sont les ailes des vaisseaux.
Je vais t'en dire une preuve bien convaincante, qui ne t'échappera pas.
Quand, te rencontrant, un autre voyageur
dira que tu portes un battoir à vanner sur ta robuste épaule,
alors, plante en terre ta rame bien faite,
offre un beau sacrifice à Poseidon,
un bélier, un taureau, un porc en état de saillir les truies;
puis reviens à ta maison sacrifier des hécatombes sacrées
aux dieux immortels qui habitent le ciel immense,
à tous, sans en omettre aucun.
Pour toi, la mort te viendra hors de la mer, très douce :
elle te prendra quand tu seras affaibli par une vieillesse opulente;
autour de toi, tes peuples seront prospères.
Voilà ce que je te prédis en toute vérité. »

samedi 25 juin 2011

248



« On ne se gêne pas pour piétiner les choses et les rendre encore plus élémentaires et bêtes, et encore plus obscures, et on n’hésite pas non plus à les laisser en triste état sur le pavé, en décalage désormais par rapport à elles-mêmes. Et ceci au moyen de quelques simples mots. Comment y résister ? »

vendredi 24 juin 2011

247



« L'amour est masochiste. Ces cris, ces plaintes, ces douces alarmes, cet état d'angoisse des amants, cet état d'attente, cette souffrance latente, sous-entendue, à peine exprimée, ces mille inquiétudes au sujet de l'absence de l'être aimé, cette fuite du temps, ces susceptibilités, ces sautes d'humeur, ces rêvasseries, ces enfantillages, cette torture morale où la vanité et l'amour-propre sont en jeu, l'honneur, l'éducation, la pudeur, ces hauts et ces bas du tonus nerveux, ces écarts de l'imagination, ce fétichisme, cette précision cruelle des sens qui fouaillent et qui fouillent, cette chute, cette prostration, cette abdication, cet avilissement, cette perte et cette reprise perpétuelle de la personnalité, ces bégaiements, ces mots, ces phrases, cet emploi du diminutif, cette familiarité, ces hésitations dans les attouchements, ce tremblement épileptique, ces rechutes successives et multipliées, cette passion de plus en plus troublée, orageuse et dont les ravages vont progressant, jusqu'à la complète inhibition, la complète annihilation de l'âme, jusqu'à l'atonie des sens, jusqu'à l'épuisement de la moelle, au vide du cerveau, jusqu'à la sécheresse du cœur, ce besoin d'anéantissement, de destruction, de mutilation, ce besoin d'effusion, d'adoration, de mysticisme, cet inassouvissement qui a recours à l'hyperirritabilité des muqueuses, aux errances du goût, aux désordres vaso-moteurs ou périphériques et qui fait appel à la jalousie et à la vengeance, aux crimes, aux mensonges, aux trahisons, cette idolâtrie, cette mélancolie incurable, cette apathie, cette profonde misère morale, ce doute définitif et navrant, ce désespoir, tous ces stigmates ne sont-ils point les symptômes mêmes de l'amour d'après lesquels on peut diagnostiquer, puis tracer d'une main sûre le tableau clinique du masochisme ? »

jeudi 23 juin 2011

246



« Tu me tues.
Tu me fais du bien.
J'ai le temps.
Je t'en prie.
Dévore-moi. »

mercredi 22 juin 2011

245



« Cet amour insensé que je lui porte reste pour moi un insondable mystère. Je ne sais pas pourquoi je l'aimais à ce point là de vouloir mourir de sa mort. J'étais séparée de lui depuis dix ans quand c'est arrivé et je ne pensais que rarement à lui. Je l'aimais, semblait-il, pour toujours et rien de nouveau ne pouvait arriver à cet amour. J'avais oublié la mort. »

mardi 21 juin 2011

244



« L’argent falsifie le temps. Autrefois c’était le contraire. Le temps d’horloge a accéléré la montée du capitalisme. Les gens ont cessé de penser à l’éternité. Ils ont commencé à se concentrer sur les heures, les heures d’homme, en utilisant la main-d’œuvre plus efficacement. »

lundi 20 juin 2011

243



« La main de Baldovina ouvrit le tulle de la moustiquaire pour s’y frayer passage puis tâta en pressant doucement comme s’il y avait eu là-dessous une éponge, non un enfant de cinq ans ; elle ouvrit la petite chemise et examina la poitrine de l’enfant toute couverte de cloques, de sillons d’une couleur violente, et cette poitrine se gonflait et se compressait comme s’il lui fallait faire un effort considérable pour parvenir à un rythme naturel ; elle ouvrit aussi la braguette du vêtement de nuit et vit les cuisses, les petites testicules pleins de cloques qui allaient s’agrandissant, et en avançant encore davantage ses mains, elle remarqua que les jambes étaient froides et tremblaient. »

dimanche 19 juin 2011

242



« Tuée sur le coup.
Elle n’a pas souffert.
Projetée à neuf mètres. »

samedi 18 juin 2011

241



« Je tourne dans la cellule comme une mouche qui ne sait pas où aller mourir. »

vendredi 17 juin 2011

240



« Supposé que notre ennemi ne soit pas encore né, mais néanmoins actif. Il a sur nous l’avantage que lui donne la connaissance de notre syntaxe et l’impossibilité où nous sommes d’en modifier les circuits si nous voulons continuer à nous entendre. »

jeudi 16 juin 2011

239



« ... je me sens comme une merde, mais j'ai l'air en pleine forme. »

mercredi 15 juin 2011

238



« L’alcoolisme et la dépendance aux drogues n’étaient pour lui qu’une bastide de plus à prendre et dévaster. La syphilis s’écartait sur son passage. Le rhumatisme blennorragique, la toxémie et l’élimination insuffisante réveillaient en lui des ambitions curatives hors du commun. »

mardi 14 juin 2011

237



« Après la naissance de ma fille, j’avais caressé l’idée d’acheter un fusil pour décourager tout éventuel prétendant qui se pointerait chez nous d’ici à une quinzaine d’années. Mais ce jour-là, alors que j’écoutais ces gamines en imaginant Gabby s’exprimer un jour comme elles, débiter les mêmes banalités avec le même vocabulaire limité, je me suis demandé si je ne ferais pas mieux de l’acheter tout de suite pour me griller la cervelle. »

lundi 13 juin 2011

236



« Et si l'on est ridicule dans son métier, dans quoi sera-t-on élégant ? »

dimanche 12 juin 2011

235



« C’est bien cette fameuse histoire enfantée confusément par des générations de beaux parleurs qui ne se taisaient que pour boire, retouchée à l’eau de rose et au hachoir par les mères de famille à l’intention de fillettes et de garçonnets ensommeillés qui la poursuivaient en rêve n’importe comment, finalement donc saisie au vol et apprêtée pour l’édition par Jacob et Wilhelm Grimm tandis que leurs trois autres frères humaient l’air du pays, je suppose, puis de nouveau soumise à tous les avatars d’adaptations grossières, imprécises et souvent niai- ses, fameuse histoire, sans doute, mais qui pâtit en somme depuis l’origine de n’avoir pas d’auteur : il n’est pas trop tard pour lui en donner un.
Ce sera moi. »

samedi 11 juin 2011

234



« Sur le chemin du retour, qui me parut splendide, il neigeait à gros flocons, denses et chauds. Il me sembla presque entendre résonner quelque part un air de mon pays. Mes pas étaient vifs malgré la profondeur de la neige dans laquelle je continuais à progresser avec ténacité. Chaque pas accompli fortifiait ma confiance ébranlée, ce dont je me réjouissais comme un petit enfant. Tout ce qui avait existé autrefois fleurissait et m'enveloppait gaiement d'une roseraie comme un parfum juvénile. Il me sembla presque que la terre entonnait un chant de Noël et presque aussitôt déjà un chant de printemps. »

vendredi 10 juin 2011

233



« Je suis sûre de n'être pas Gertrude, dit-elle, car elle a de longs cheveux bouclés, alors que les miens ne bouclent pas du tout... et je suis sûre de n'être pas Florence, car je sais toutes sortes de choses et elle, oh! elle en sait si peu ! En outre, elle est elle, et je suis moi, et — oh, là, là que c'est donc compliqué ! »

jeudi 9 juin 2011

232



« "Je ne suis pas un héros, tu te trompes sur mon compte. Je fais face quand il le faut. Mais je ne me bouscule pas pour empoigner la roue de l'Histoire, comme vous autres !" Et vint alors un mot complètement désarmant : "Je suis trop paresseux pour ça !" L'explication qui suivit, sur la belle qualité qu’était la paresse, qui permettait à ;l'homme de développer sa raison et d'agir avec réflexion, culmina dans cette sentence : "On a le temps de penser. L'application au travail ne fait que gêner." »

mercredi 8 juin 2011

231



« Des fois, je ne sais pas trop si l'on a le droit de dire qu'un homme est fou ou non. Des fois, je crois qu'il n'y a personne de complètement fou et personne de complètement sain tant que la majorité n'a pas décidé dans un sens ou dans l'autre. »

mardi 7 juin 2011

230



« Enfantin, enfant, enfant-roi, enfant-seigneur, oh si maintenant j'avais assené un coup de hache à ma tante, elle ne s'en serait pas relevée --- et je m'effrayai de ma propre force, de mes ongles, de mes poings, dans l'enfant je craignis l'homme. Que faisais-je là, dans cet escalier, où allais-je, pourquoi ? »

lundi 6 juin 2011

229



« han ! .., han !.., tu.., t’irrupt’ ton braqu’ à mon caqu’ !.. qu’à gicler ma connass’, fée de mon berceau d’oest, bise mortel à mes bossoirs tressés le jus sanie de ta montur’ !, — als’ rebecq au shak’-hand, ça qu’al’ jact’ qu’ça lui r’lanç’ l’hyponcondr’ ! als’ revendiqu’ sa mort d’âtr’ sasie par le vié !.., »

dimanche 5 juin 2011

228



« dans les souterrains, sous la forme de petit cadavre bien embaumé, elle ne soulèvera plus ses jupes, elle ne se vendra plus au premier marchand de copie, tas d’os désormais ; futur précaire car les baumes se corrompent encore
   ô qu’encre la fille libère
   pas se donne d’auques, l’us de pas aux Dives
ne se proste pas tuée »