lundi 17 novembre 2014

746



« Après leur départ de la tente, les spectateurs peuvent quitter le lieu de la conférence entre les personnages qui se seront entre-temps alignés de part et d’autre à l’extérieur. Ces personnages restent muets. » 
 

vendredi 14 novembre 2014

745



« Nous, aujourd’hui, ne pouvons faire que ce que nous pouvons, pas ce que nous voudrions » 
 

mercredi 12 novembre 2014

744



« Aie ! Joyeuses compagnes,
Votre folie est contagieuse.
Mon âme se soulève et retombe, et bondit et se vautre avec vous !
Je vous encourage de mes cris, ô joyeuses bacchantes à la tête blanche.
Votre vue vaut tous les breuvages,
Je n’ai plus sur le front de bandeau d’airain,
Mon cœur et mon cerveau s’humectent
Et je hurle toujours en réponse
À vos grondements inarticulés,
Ô rouleaux énormes, rugissantes vagues,
Si proches des pensées humaines
Dans la violence aveugle
De votre folie meurtrière. » 
 

lundi 10 novembre 2014

743



« Je suis une voiture. Une voiture grise. Gris sombre, presque noire. Je roule fenêtres ouvertes. Mon moteur bourdonne devant mon pare-brise, tranquille, tandis que mes suspensions amortissent les imperfections de la chaussée : je suis une voiture, aux pneus noirs sous les ailes de sa carrosserie. Sous ses volumes sans angle de tôle et de plastique.
Je suis une voiture sans imaginer changer de direction, ni la dépasser. Elle me précède. Je roule à sa vitesse, quand elle décrit devant mes roues la courbe de chaque virage. Je freine quand elle ralentit. Deux lampes rouges s'allument de part et d'autre de son coffre. Je roule derrière son pare-chocs, en suivant les courbes de son hayon dans les virages. » 
 

vendredi 7 novembre 2014

742



« Les gens subiront l’injure qu’ils baptiseront amour. Leur néant retentit de battements d’ailes. » 
 

mercredi 5 novembre 2014

741



« En énonçant cette pensée, je ne me rendais pas compte que mon raisonnement était le produit d’un mirage, que les écrivains dits universels n’avaient jamais été universels, mais étaient les écrivains d’une classe déterminée, la plus aisée, compris et encensés par la culture de cette classe, admirés et idéalisés pour les satisfactions qu’ils étaient capables d’ajouter aux raffinements que, par essence, elle accumulait déjà comme un bien excellemment acquis.
Ceux d’en bas, la masse opaque, élastique et terrible, qui à travers tous les âges vivait en se démenant dans la terrible lutte des classes, n’existaient pas pour ces génies. Et nous, écrivains démocratiques, usés dans tous les sens par cent mille conventionnalismes, étions totalement incapables d’écrire quoi que ce soit qui remue la conscience sociale engoncée dans un dégoûtant « laisser-aller ». »

lundi 3 novembre 2014

740



« Je me souviens d’avoir pioché tout un mois assise derrière une table placée face à un champ de blé long comme la mer, levant régulièrement de mes feuilles un regard d’aveugle, les oreilles bouchées avec toute la cire d’Ulysse, attachée au mât de mon stylo et, malgré cela, noter dans un coin pour plus tard le bond d’un couple de chevreuils dans le sillon du tracteur, le vol euphorique et scintillant d’un beau flambé, l’alarme de pompier du village et le film complet des métamorphoses nuageuses sur ma tête. Ces perceptions « de côté » viennent à l’esprit avec la précision des événements jaillis aux points de jonction des mondes parallèles (qui ne le sont jamais). »