mercredi 23 octobre 2013

603



« J’ai suivi Vaughan dans les toilettes du pavillon des urgences. Curieux de savoir si j’allais aussi découvrir des cicatrices sur sa verge, j’ai baissé les yeux dans sa direction. Le gland, qu’il tenait entre le pouce et l’index, était barré d’une entaille aux contours nets qui semblait le doter d’un canal spermatique supplémentaire. Quel véhicule accidenté l’avait ainsi marqué ? Quelle cérémonie avait uni de la sorte son orgasme à un pommeau de levier chromé ? L’excitation terrifiante liée à cette blessure occupait entièrement mes pensées lorsque j’ai regagné la voiture derrière Vaughan, dépassant les derniers visiteurs qui sortaient du pavillon. La légère déviation latérale de cette cicatrice, comme l’inclinaison du pare-brise de la Lincoln, donnait une assez bonne image de la trajectoire oblique et obsédante de Vaughan dans les espaces libres de mon esprit. »

lundi 21 octobre 2013

602



« La Machine n’est qu’ossature, rien mieux qu’un emboîtage architectural éviscéré, cubique, sans complexité de construction. C’est une pile creuse faite de niveaux amoncelés sur un empierrement mastoc, à répétition d’étages, une cage vide, libre au vent, des parois criblées de fenêtres sans vitres et protection.. Sa fonction fut d’exposer, de magasiner, de remiser à la vue dans une série de casiers verticaux des rufians, des ribauds, des malandrins et malfrats trépassés, de les montrer pendus, à tous, au plus grand nombre- dans l’avant-goût des grands cinémas-, non pas d’exécuter »

vendredi 18 octobre 2013

601



 « Et croyez bien que sur votre charette, vous repartirez les pieds devant et les coilles au bec. »

mercredi 16 octobre 2013

600



« Nous passons notre existence à la recherche d'une solution, d'une chose qui nous console, nous apporte le bonheur et éloigne de nous tous les maux. »

lundi 14 octobre 2013

599



« Mon imagination me crée des amis parfaits pour l’avenir, mais, en attendant, je me contente de n’importe qui. »

vendredi 11 octobre 2013

598



« Petit patapon et grand patapon, petit Belt et grand Belt, petit et grand ABC, Pépin le Bref et Charlemagne, David et Goliath, Tom Pouce et Gargantua ; je restai l'enfant de trois ans, le gnome, le Petit Poucet, le nabot qui ne veut pas grandir ; pourquoi ? Pour échapper à des distinctions comme le petit et le grand catéchisme ; pour n'être pas à l'âge dit adulte, un mètre soixante-douze, livré à un homme qui, debout à se raser devantla glace, se nommait mon père ; pour n'être pas contraint de reprendre une boutique qui, selon le voeu de Matzerath, devait - denrées exotiques - signifier pour un Oscar majeur l'univers des adultes. »

mercredi 9 octobre 2013

597



« Vous parlerai-je aussi de Monsieur Oneillard qui a le membre en tire-bouchon? C’est une grande rareté, vous en conviendrez. Oneillard me met dans l’embarras car lui aussi ne voulant rien que de très jeune, exige que les orifices lui laissent assez de jeu pour se tirebouchonner à vit-joie, y tracer ses ronds et ses spirales, s’y tourner en dansant, y faire ses volutes et ses hélices, jouer des hanches et du croupion tout en faisant aller son braquemart. Ce n’est point aisé dès qu’on veut de l’étroit.
Monsieur Bigot n’est guère original, sauf qu’il lâche un vent à chaque coup qu’il pousse, une particularité qui parfois dérange.
Monsieur l’Abbé Montini est un misérable masturbateur qui toujours s’efforce de payer en monnaie de singe après avoir occupé un fauteuil pendant des heures, se branlant sans fruit tout en ne cessant de déplorer la cruauté de Ponce Pilate et la malice des pécheurs.
Il faut de bons nerfs pour les supporter. »

lundi 7 octobre 2013

596



« Ma chère Louise,
Il y a longtemps que je vous écrivis mais je ne vous entretiendrai jamais assez du soin qu’il nous faut employer à satisfaire nos clients. Vous ne sauriez croire combien difficile sont certains d’entre eux! Prenons par exemple Monsieur Laustensoire qui entend se faire servir par un Hercule, jusqu’à cinq fois de suite sans désemparer. Bien, direz-vous, ma chère Belle, cela se trouve avec quelque bonheur. Vous n’auriez pas tort si Monsieur Laustensoire ne s’était mis en tête un Hercule de douze ans. Où voulez-vous donc le quérir? La Pinette me conseille de masquer en muguet quelque fort de la Halle, un de ceux qui hardiment savent copuler debout contre un mur, les jambes écartées, le vit battant jusqu’au nombril, mais je vous le répète, je répugne à ce genre de subterfuge. Il n’empêche que ce tantôt je ne pus que penser à Laustensoire en observant une petite araignée besogner une grosse avec une étrange ardeur. »

vendredi 4 octobre 2013

595



« Elle sentait que son âme, usée par le mépris, usée par l’aigreur et les mauvais sentiments, était morte à l’amour, à moins, peut-être, que l’amour ne fût tout autre chose que cet oiseau brillant et enchanté dont elle avait jadis rêvé. »

mercredi 2 octobre 2013

594



« Alors que Mr Darcy s'éloignait, Elizabeth sentit son sang se glacer. Jamais de sa vie elle n'avait été insultée de la sorte. Le code des guerriers exigeait qu'elle vengeât son honneur. En veillant à ne pas attirer l'attention, Elizabeth baissa la main jusqu'à sa cheville, où elle trouva la dague qu'elle dissimulait sous sa robe. Elle avait l'intention de suivre cet orgueilleux Mr Darcy à l'extérieur et de lui trancher la gorge. »

lundi 30 septembre 2013

593



« Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, nous affrontions un ennemi qui nous avait déclaré la guerre totale. La vraie. Il n'avait aucune limite. Il ne négocierait jamais. Il ne se rendrait jamais. Il combattrait jusqu'au dernier, et vous savez pourquoi ? Parce que contrairement à nous chacun d'entre eux n'avait qu'un seul but dans l'existence : dévorer toute vie sur terre. Et ce genre d'ennemi nous attendait juste au-delà des Rocheuses. Voilà ce que nous devions combattre. »

vendredi 27 septembre 2013

592



« Vous comprenez quelque chose à l'économie, vous ? Je veux dire, le bon gros capitalisme d'avant-guerre ? Vous avez pigé comment ça marchait ? Moi pas. Et ceux qui affirment le contraire racontent des conneries. Il n'y a rien d'absolu là-dedans, aucune loi scientifique, rien du tout. Tu gagnes, tu perds, tout ça, c'est de la merde. »

mercredi 25 septembre 2013

591



« Une illusion se divise en trois étapes.
Tout d’abord, les préparatifs, qui permettent d’esquisser, de laisser deviner ou d’expliquer la nature de la tentative à venir. Les accessoires sont visibles. Des volontaires appartenant au public participent parfois à ce prélude, au cours duquel le magicien dispense autant de renseignements trompeurs qu’il lui est possible.
L’exécution qui, pour susciter le spectacle de la magie, associe une vie passée à s’entraîner au don inné de comédien du prestidigitateur.
Enfin, la dernière étape, aussi appelée effet ou prestige, qui est le produit de la magie. Si l’illusionniste tire un lapin de son chapeau, l’animal, apparemment dépourvu de toute existence avant l’exécution du tour, peut être qualifié de prestige de ce tour. »

lundi 23 septembre 2013

590



« Il existait un certain seuil de tolérances, je le pressentais ; une limite mouvante qui se tenait bien au-delà des rassemblements chaleureux de la société humaine. Vous franchissiez cette limite et il était inutile d’espérer pouvoir un jour revenir. Et ce n’était pas nécessairement la société humaine qui vous excluait définitivement, mais quelque chose à l’intérieur de vous, une nouvelle singularité inassimilable qui vous rend inapte à vos propres yeux, à la fréquentation de vos congénères. »

vendredi 20 septembre 2013

589



« Mais jamais auparavant dans l'histoire de notre pays n'avions-nous vu la Mère de Dieu intervenir aussi résolument qu'à Malmédy en 1919 où un homme s'était introduit dans la maison d'une femme, animé, comme on pouvait le déduire de son pantalon déjà défait, d'intentions malhonnêtes. La femme le menaça d'appeler à l'aide la Sainte Vierge si l'intrus importun ne couvrait pas sur le champ ses nobles parties et ne quittait pas la maison. Il ne fait aucun doute que le violeur a bien dû s'amuser d'une, haha, vierge. Jusqu'au moment où l'intrépide Alma Redemptoris Mater est apparue subito presto au pied du lit, illuminant la chambre entière de l'éclat de son auréole, et a chassé dans la nuit le pauvre pécheur. D'après certains, il souffre depuis de problèmes d'érection. On le serait à moins. »

mercredi 18 septembre 2013

588



« Malheureux celui auquel les souvenirs d'enfance n'apportent que crainte et tristesse. Misérable celui dont la mémoire est peuplée d'heures passées dans de vastes pièces solitaires et lugubres aux tentures brunâtres et aux alignements obsédants de livres antiques, et de longues veilles angoissées dans des bois crépusculaires composés d'arbres absurdes et gigantesques, chargés de lianes, qui, en silence, poussent toujours plus haut leurs bras sinueux. Tel est le lot que les dieux m'ont accordé à moi, l'étonné, le banni, le déçu, le brisé. Et pourtant je me sens étrangement satisfait et m'accroche farouchement à ces souvenirs flétris lorsque mon esprit, pour un moment, menace d'aller au-delà, chercher ce qui est autre. »

lundi 16 septembre 2013

587



« Des cimes de l'Olympe il descendit, plein de courroux,
Portant son arc et son carquois étanche sur l'épaule.
Les traits sonnèrent sur l'épaule du dieu courroucé,
Quand il partit, et c'était comme si la nuit marchait »

vendredi 13 septembre 2013

586



« Mon père était un socialiste et mettait tout en oeuvre pour être reconnu comme tel. Posséder, pour lui, signifiait "plus à épousseter". Posséder vous possédait, jamais l'inverse. Si, grâce à une épargne imprévue, nous menacions de terminer le mois avec un petit surplus d'argent, il vidait le compte bancaire et buvait tout ce qui restait pour nous protéger des tentations du capitalisme. »

mercredi 11 septembre 2013

585



« On est toujours un peu salaud quand on abandonne une femme avec un enfant, mais ça vient de que l'on a été beaucoup trop peu salaud pour quitter cette femme avant de l'avoir mise en cloque. »

lundi 9 septembre 2013

584



« A ces mots, Athéna à face de chouette s'en alla vers l'Olympe où se trouve, dit-on, pour toujours l'inébranlable séjour des dieux. Il n'est pas secoué des vents, il n'est jamais trempé des pluies, la neige n'en approche pas. C'est avant tout le déploiement de l'éther sans nuages, le déferlement d'une éclatante blancheur. Les dieux bienheureux y passent tous leurs jours à se réjouir, et c'est là que la déesse à face de chouette s'en alla, quand elle eut tout expliqué à la jeune fille. »