« ll y a une joie sauvage, panique et totale, une
joie préhistorique et animale à prendre possession d’un rêve de femme. Ce n’est
pas comme faire l’amour avec elle. C’est bien davantage. En comparaison, l’acte
sexuel - préliminaires et pénétration, caresses et insémination, orgasme - est
d’une grande banalité. Tu ne connais pas une personne sous prétexte que tu vis
avec elle, manges avec elle, fais l’amour avec elle. Tu ne la connais pas sous
prétexte qu’elle se confesse à toi : des dizaines de confesseurs avaient
entendu les hommes et les femmes qui venaient chez Bàart, sans pour autant les
connaître comme Bàart les connaissait. On connaît quelqu’un quand on connaît ce
qu’il imagine et ce qu’il rêve. C’est là qu’est son fin fond, son ressort
secret, en un lieu qu’il ignore lui-même. »